Mirabelle VOMSCHEID, autrice de romans Site littéraire

La porte des secrets

La porte des secrets

 

Prologue

 

Quinze ans plus tôt...

Delphine et Laura chahutaient en gloussant joyeusement dans les couloirs du manoir, insouciantes du froid qui sévissait à l'extérieur. En cette période festive, le paysage était couvert d'un magnifique manteau de neige immaculé, si épais qu'aucun membre de la famille ne s'était risqué à emprunter l'allée principale menant au village. La maison familiale, située sur les hauteurs de Ludres, à l'orée de la forêt, offrait un superbe panorama de l'agglomération nancéienne qui prenait, en cette veille de Noël, des allures de carte postale.

— Tu ne m'attraperas pas ! cria la petite Laura au regard candide.

— C'est ce qu'on verra, répondit sa cousine, une jeune fille de treize ans aux cheveux d'un blond cendré.

Elle tendit les bras pour saisir le gilet de sa cadette et la manqua de peu. Laura fronça son petit nez parsemé de tâches de rousseur, puis se retourna brièvement et poussa un nouvel éclat de rire. Elle regarda Delphine d'un air malicieux et dévala les escaliers. Une fois au rez-de-chaussée, elle embrassa les lieux d'un regard. Où allait-elle se cacher pour échapper à sa cousine ? Tout à coup, une idée s'imposa à elle. Deux jours plus tôt, la fillette avait vu sa grand-mère prendre une clé dissimulée derrière un tableau de l'entrée et se faufiler dans la pièce condamnée depuis des années. Laura se demandait depuis longtemps ce que pouvait bien cacher cette dernière. C'était l'occasion de le découvrir aujourd'hui. Elle se retourna pour voir si elle était observée, puis s'empara discrètement de la clé et, au pas de course, se rendit à l'autre bout du corridor, face à une porte close. Elle enfonça la clé dérobée dans la serrure. La fillette de huit ans était toute excitée à l'idée de semer une nouvelle fois Delphine et de lever le voile sur cet endroit maintenu volontairement à l'écart de la famille. Le cœur battant et retenant son souffle, elle poussa délicatement la porte, puis pénétra à l'intérieur. La salle spacieuse était plongée dans l'obscurité, seul le rai de lumière sous la porte donnait un éclairage. Laura n'osa pas appuyer sur l'interrupteur de peur d'attirer l'attention sur elle. Avec précaution, elle avança au centre. La présence d'une boule à neige posée sur la poutre d'une cheminée attira son regard. La fillette tendit la main vers l'objet et l'effleura de l'index. Son geste eut un effet stupéfiant. La boule projeta vers le plafond et les parois murales une multitude de points lumineux, accompagnés d'une mélodie qui envoûta l'enfant. Les yeux rivés sur l'étrange objet, Laura contemplait le paysage forestier au milieu duquel était nichée une maisonnette en bois. Juste devant la façade se tenait un faon. La petite fille fronça les sourcils à la vue d'une lumière ténue qui clignotait par intermittence à travers de l'une des fenêtres de la minuscule habitation. La fillette s'approcha de la boule pour mieux observer les détails composant le décor. Elle repoussa l'une des mèches rousses, qui lui barrait le visage, et colla son front sur la sphère en verre. Sa position eut pour effet de faire fuir le faon qui fit un bond sur le côté et disparut dans la forêt. Laura crut discerner des rires dans la maisonnette, tandis que le souffle du vent traversait les branches des sapins en mugissant. La fillette écarquilla les yeux quand une très jeune femme se pencha par la fenêtre et lui fit des signes de la main. Elle lui intimait de venir. Laura, consternée, s'interrogeait sur l'existence réelle de tous ces personnages qui animaient la boule. Ils ne pouvaient être vrais. Et pourtant son cerveau de petite fille voulait y croire, elle sentait que cet environnement miniature respirait la vie, et elle mourait d'envie de s'y rendre d'autant que la jeune femme à la chevelure noire de jais se faisait de plus en plus pressante. Elle insistait pour qu'elle vienne. C'est alors que Laura laissa ses doutes de côté et sentit le sol se dérober sous ses pieds. Elle fut aspirée dans le décor magique de la boule à neige.

Des yeux bleus, effrayés, dissimulés derrière le pan du rideau de la porte-fenêtre, venaient d'assister à toute la scène.

La suite à découvrir ici : La porte des secrets

 

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